Lorsque j’ai commencé cette série d’articles à propos de la fragilité et de la résilience des équipes, je me suis dit que je me devais de parler des conditions hivernales que l’on peut rencontrer dans la région de Boston. Chaque année, nous savons que nous allons devoir subir plusieurs tempêtes de neiges de taille importante. Et lorsqu’il neige beaucoup et pendant longtemps, nous savons que nous ne devons pas prendre la route pour que les chasse-neiges puissent dégager la neige.

L’entreprise et l’équipe dont j’ai parlé dans la 1ère partie et dans la 2ème partie n’avaient pas la possibilité de travailler à domicile lors des tempêtes de neige.

Tout le monde peut avoir à subir des épisodes météorologiques pouvant menacer sa capacité à travailler. Peut-être n’avez-vous pas chez vous des tempêtes de neige, des tornades ou des ouragans. Mais peut être que quelqu’un a coupé le câble qu’il ne fallait pas et par conséquent, votre entreprise se retrouve sans accès à internet ou sans électricité.

Ce sont des choses qui arrivent.

Aujourd’hui, alors que j’écris cette série d’articles, le coronavirus se répand sur l’ensemble du globe. Des entreprises réfléchissent désormais sur ce qu’il faut faire pour travailler à partir de chez soi.

C’est l’une des raisons pour lesquelles Mark et moi avons écrit le livre From Chaos to Successful Distributed Agile Teams (vo). Votre équipe n’a peut-être pas besoin d’une approche agile. Néanmoins, toutes les équipes ou presque ont besoin d’un espace de travail qui puisse leur permettre de travailler à distance.

Lorsque votre équipe peut collaborer de « n’importe où », l’équipe construit sa résilience. Même s’il s’agit simplement pour des raisons de conditions météorologiques, les membres l’équipe ne peuvent pas toujours être présents au sein de l’équipe colocalisée.

Dans la 1ère partie de cette série d’articles, j’ai écrit au sujet de travailler ensemble en tant qu’équipe et dans la 2ème partie de la nécessité de raccourcir les boucles de feedback . Aujourd’hui, comment votre équipe peut-elle travailler ensemble de « n’importe où » ?

Les équipes qui ont un espace d’équipe virtuel peuvent travailler de « n’importe où ». Elles sont résilientes peu importe la localisation de ses membres.

De quels outils votre équipe a-t-elle besoin dans son espace de travail ?

Mark et moi, avons listé dans le livre les outils suivants pour un espace de travail d’équipe :

  1. Le dépôt du code.
  2. Le dépôt des tests.
  3. Le dépôt des anomalies. Ce dépôt peut être différent du backlog.
  4. L’emplacement où sont stockés les éléments du backlog pour le travail à venir à court terme sur l’ensemble des fonctionnalités concernées.
  5. L’emplacement pour voir la ou les feuilles de route pour le long terme.
  6. L’espace de travail du projet de l’équipe afin que l’équipe puisse y mettre les documents du projet dans un espace spécifique.
  7. L’emplacement pour récupérer les données de l’équipe. Cela peut inclure le tableau d’équipe et ses indicateurs.
  8. L’emplacement pour indiquer le statut du projet.

Nous n’avons pas parlé spécifiquement de la manière de collaborer pour écrire des stories, du code ou des tests. Nous n’avons pas listé non plus les différents outils de communication.

(Ajout : j’aurais dû mentionner les webcams et les micros. Chaque personne de l’équipe a besoin d’une webcam et d’un casque/microphone décent.) )

Remarque : Nous n’avons pas mentionné non plus le débit de la bande-passante pour l’accès à internet. Chaque membre de l’équipe devrait avoir un accès en haut-débit. Si vous voulez que les personnes puissent travailler à distance pour des raisons de conditions météorologiques ou sanitaires, elles ont besoin d’un accès à internet haut-débit chez elles.

Si vous commencez avec ces outils, vous pourrez voir par la suite les outils dont vous avez besoin.

Lorsque Mark et moi parlons de tableaux, la plupart du temps nous proposons qu’une équipe démarre avec un tableau vierge afin qu’elle puisse apprendre quel est son flux de travail. Il est inutile d’utiliser un tableau (et un flux - NdT) « standard » si votre équipe ne suit pas ce flux.

Si votre équipe est novice en travail à distance, vous pouvez envisager partir d’un nouveau tableau dans lequel vous pouvez créer des colonnes sans avoir à coller à un tableau ou à un outil particulier. Votre flux virtuel peut s’avérer être différent de votre flux colocalisé.

Qui a les licences ?

Au début des années 2000 et dans les années 2010, j’ai fait un certain nombre d’ateliers pour des équipes distribuées. Dans chaque cas (oui, dans chacun de ces plus de 20 ateliers), les personnes présentes dans mes ateliers ont indiqué que tout le monde n’avait pas de licences pour tous les outils nécessaires.

En 2013, j’ai écrit avec Shane Hastie un article intitulé Leçons apprises des ateliers menés au sujet des équipes distribuées (vo). Déjà à cette époque, nous avions observé que des responsables essayaient d’économiser de l’argent sur les licences. Et encore aujourd’hui, j’entends ce genre d’horreur.

Je comprends que le souhait des responsables de gérer les dépenses. Je gère d’ailleurs les dépenses de ma propre entreprise, aussi.

Comment savez-vous si les licences valent le prix payé ? Mesurez le temps de cycle. Comment de temps cela prend-il pour une équipe de finir (de vraiment finir) une fonctionnalité donnée ? Où est-elle retardée ?

Je parie que vous avez déjà vu vous aussi la chose suivante : les responsables d’une entreprise demande à une équipe de partager ses licences pour le système de suivi des anomalies. Les développeurs étaient à New York et les testeurs au Vietnam (dans le cas présent, cela voulait dire un nombre d’heures en commun insuffisantes pour bien collaborer en raison des différences de fuseaux horaires, mais les responsables pensaient qu’ils pouvaient quand même économiser de l’argent en choisissant de fonctionner comme ça).

Un jour, les développeurs ont oublié de passer la main pour leurs licences après leur journée de boulot. Un autre jour, ce sont les testeurs qui ont oublié.

Et, lorsque les développeurs et les testeurs ont tous été d’accord pour se réunir en ligne, ils n’avaient pas assez de licences pour voir les données dans l’outil. Et parce que l’accès à internet était instable à New York (un gros fournisseur d’accès à internet ayant des problèmes techniques), et les personnes de New York ayant toutes les licences pour l’outil de communication, les personnes du Vietnam étaient dans l’impossibilité de relancer la réunion de leur côté.

Les responsables avaient pensé que la ville de New York avait toute l’infrastructure nécessaire. Cela s’est avéré inexacte ce jour-là. Et les responsables avaient pensé aussi que l’équipe pourrait partager ses licences. Raisonnement malavisé, court-termiste.

Et pire encore, ils pensaient que les personnes pourraient travailler « n’importe quand ».

Est-ce que les personnes devraient travailler « n’importe quand » ?

Trop de responsables pensent que les personnes devraient travailler lorsque l’entreprise a besoin d’elles. Mark](https://www.markkilby.com/) appelle cela « être volontaire désigné d’office » pour travailler lorsqu’il y a besoin.

Je préfère des heures raisonnables qu’une équipe puisse choisir. Bien entendu, une équipe peut avoir besoin d’avoir des heures qui se recoupent avec celles d’autres équipes.

(Une remarque à propos des heures : je n’ai jamais vu des personnes être en mesure de travailler plus de 8 heures par jour tout le temps. Lorsque mes clients mesurent le temps de cycle, ils réalisent que l’entreprise perd au moins un quart de journée par salarié. Cela peut atteindre parfois jusqu’à une demi-journée). Si votre équipe est en mesure de collaborer et de travailler ensemble, les gens pourraient finir de travailler après des journées de 5 ou 6 heures. Ce qui est plutôt bien. Vous pouvez lire d’autres éléments sur ce sujet dans mon article Mythe sur le management #10 : je suis en mesure de mesurer le travail accompli par le temps que passent les gens au travail (vo).)

Si vous n’avez pas lu notre article à Mark et à moi sur l’organisation des espaces de travail des équipes distribuées commencent par des heures qui se recoupent, faites-le svp.

Et dans le livre, nous racontons l’histoire d’un chef de projet qui était supposé être au téléphone à 3 heures du matin avec une équipe lointaine, être au bureau à 9 heures et rester disponible à 20 heures pour un autre appel téléphonique avec une autre équipe tout aussi éloignée.

C’est complètement dingue.

Pouvez-vous optimiser pour plus de résilience ?

Lorsque nous optimisons pour plus de résilience, nous prenons en considération la gestion des risques sur notre capacité à travailler.

Si les gens font face à un évènement météorologique tel que la neige, ils ont besoin de temps pour la déblayer. S’ils font face à un évènement sanitaire, ils ont besoin de temps pour rester en bonne santé ou pour récupérer.

Et, si leurs enfants sont confinés à la maison au lieu d’être à l’école, les adultes ne sont pas disponibles autant qu’ils le voudraient. Si l’équipe décide à quel moment c’est « n’importe quand » les adultes peuvent être en mesure de trouver une approche raisonnable pour gérer leurs enfants d’un côté et leur boulot de l’autre.

Plus l’équipe collabore en tant qu’équipe (c.f. 1ère partie) et plus elle devrait normalement réduire ses boucles de feedback (c.f. 2ème partie) et plus l’équipe est en capacité de démontrer qu’elle peut travailler en mode virtuel (ce qui est le sujet de la présente partie), plus elle est en capacité d’être résiliente.

La série :


Auteur : Johanna Rothman
Source : Build Team Resilience: Work “Anywhere” and “Anytime” (Part 3)
Date de parution originale : 06 Mars 2020


Traducteur : Nicolas Mereaux
Date de traduction : 08/04/2020


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