Un certain nombre de tentatives d’atteindre l’agilité au niveau de l’entreprise même s’avèrent erronées et bidons. Néanmoins je tends à considérer le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide. L’agilité bidon, c’est un signal qu’il faut faire mieux

Récemment, j’ai été amené à prendre la parole à l’occasion d’un congrès interne d’une grande banque internationale. Les dirigeants de la banque souhaitent devenir plus agiles, ils ont donc fait venir quelques centaines de responsables de différents pays et de différents départements pour discuter de l’“agilité en entreprise”. J’ai donc été invité à offrir un point de vue extérieur, et le PDG de la banque m’a précédé en venant donner quelques mots d’encouragements et de soutiens à l’assemblée.

D’abord laissez-moi vous dire que je suis heureux de ne pas diriger une banque traditionnelle. Imaginez donc la pression considérable sous laquelle travaillent les responsables des banques : les clients demandant davantage de services via leurs téléphones portables ; les pirates informatiques essayant de pénétrer les systèmes bancaires ; les géants de l’informatique comme Google, Apple et Paypal offrant des systèmes de paiements alternatifs ; les startups de la fintech construisant facilement de nouvelles solutions bancaires sans avoir à maintenir de vieux systèmes ; et en plus maintenant la blockchain et les cryptomonnaies qui viennent ébranler le concept même d’institutions financières fiables ! Il n’est donc pas étonnant que l’appel à l’action de la part du PDG puisse résonner à mes oreilles comme un tant soit peu désespéré. Les organisations doivent atteindre l’agilité au niveau de l’entreprise. C’est soit être agile ou soit mourrir !

Il y avait juste un problème.

Le discours du PDG était une vidéo enregistrée. Le discours a été diffusé au public sur écran géant. Et il était facile de voir, au mouvement de ses yeux, que le PDG lisait son message d’encouragement à partir d’un prompteur. L’appel à l’agile était pré-formaté.

À la fin des 10 minutes de vidéo, tout le monde a applaudi poliment. Je n’ai pas la moindre idée de pourquoi ils ont fait cela, car le PDG n’était pas là pour les entendre. C’était comme s’il avait eu quelque chose de mieux à faire que de discuter avec les employés de la survie de la banque. Je ne pense pas qu’il s’agit d’un bon exemple d’agilité au niveau de l’entreprise.

C’était de l’agile bidon.

J’ai déjà vu ce type de comportements en maints endroits. Les cadres dirigeants me demandent comment innover plus vite, tout en étant assis dans leurs bureaux privatifs avec de la moquette épaisse et des œuvres d’arts modernes présentes un peu partout. Les hauts responsables demandent aux employés d’en faire plus en moins de temps alors qu’ils s’affublent de costumes, cravates hors de prix et s’octroient de généreux bonus. Et les responsables de l’entreprise discutent d’auto-organisations des équipes scrum, à des dîners 5 repas méticuleusement préparés et sièges placés.

Lorsque l’exemple n’est pas montré aux employés et qu’ils ne voient pas d’agilité dans le comportement de leurs responsables, dans ces conditions, n’est-il pas étonnant que l’organisation ne soit pas capable de changer plus vite ?

Nous avons besoin d’une approche différente.

Il y a un fort désir au sein des cadres dirigeants d’avoir plus d’agilité au niveau de l’entreprise. C’est génial ! C’est un début. Le problème est qu’ils ne savent pas comment le montrer par l’exemple. C’est pas bon du tout. Mais c’est corrigible. Je connais et je comprends ces dirigeants. Ce ne sont pas de mauvaises personnes. Au contraire, je trouve plutôt plaisant de travailler avec la plupart d’entre eux. Ils appliquent tout simplement une manière de penser et des pratiques non-agiles dans leurs tentatives d’être plus agiles. Cela ne marche pas, bien sûr, mais c’est un problème que nous pouvons gérer. L’agile bidon est un trouble que l’on peut soigner.

J’y travaille. Venez-y jetez un œil.


Auteur : Jurgen Appelo
Source : Fake Agile
Date de parution originale : 14 Novembre 2017


Traducteur : Nicolas Mereaux
Date de traduction : 25/11/2017


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