Lors de notre dernière discussion, nous avons évoqué les raisons pouvant expliquer une augmentation de la vélocité sans que l’équipe ait accompli quoi que ce soit de plus. C’est quelque chose d’assez troublant pour des managers souhaitant utiliser la vélocité comme indicateur de la productivité, et qui se montrent insistants quant à utiliser une vélocité faible comme tel.

Reprenons la conversation :

A : Je n’aime pas trop l’explication sur les « estimations très élevées ». Quelle est l’explication alternative ? B : Eh bien, peut-être l’équipe a-t-elle appris de nouvelles compétences, connaissances et/ou techniques qui rendent les choses plus faciles à faire.

Il existe diverses façons de mesurer l’efficacité. L’une des moins utiles est de mesurer la production (en terme de quantité - NdT) dans le temps. Lorsqu’une équipe produit davantage qu’une autre sur une même semaine, n’est-elle pas plus efficace ? En fait, c’est impossible à dire.

L’équipe a peut-être fait un effort considérable et complètement disproportionné afin de pouvoir produire davantage. C’est peut être plus productif mais ce n’est pas être plus _efficace. S’il est plus difficile de faire davantage de tâches, vous vous retrouvez alors dans une situation telle, qu’il est impossible à votre « type de productivité », de passer à plus grande échelle et d’être soutenable dans le temps.

À la longue les gens vont se fatiguer à force de travailler de plus en plus dur. Ils vont finir par en avoir marre de faire des heures à rallonge. Lorsque le boulot ne devient pas plus facile et qu’il y en a toujours de plus en plus, l’équipe va manquer de profluence et se démoraliser.

Une autre manière d’envisager l’efficacité est de mesurer l’énergie utilisée par rapport à la production effectuée. Il existe des manières très faciles de produire une grande quantité de choses. La plupart d’entre elles sont de très mauvaises idées. Un virtuose du copier-coller peut produire des centaines ou des milliers de lignes de code de plus par rapport à un développeur ayant une bonne compréhension du système. Cela semble être « plus productif » mais c’est plutôt du gâchis – un virtuose du copier-coller va faire 1 000 lignes de codes là où un expert en fera peut être trois. Le virtuose du copier-coller va peu à peu étouffer la base de code à cause de la duplication de code qu’il aura introduite - cela va rendre le code de plus en plus dur à maintenir, de plus en plus lent à compiler, et une empreinte mémoire de plus en plus grande. Et tout ça avant même que nous parlions de qualité et de sécurité de leur approche respective.

Ma favorite est l’effort fourni par rapport au résultat produit. Si je peux obtenir simplement un bon résultat en 15 minutes aujourd’hui ou au bout de quatre jours de dur labeur alors il est plus efficace de l’avoir fait en 15 minutes. C’est une idée à géométrie variable, parce que l’on peut définir le résultat comme étant quelque chose que l’on souhaite voir. La qualité est toujours quelque chose à prendre en considération lorsque que l’on choisit un certain résultat. Si ce que je fais en 15 minutes est un bidouillage merdique qui dégrade la conception du code de telle sorte que personne ne sera en mesure d’effectuer après des changements sans provoquer des bogues, alors il s’agit d’un type de résultat que nous ne pouvons pas nous permettre.

Fort heureusement, il y a ici des techniques et des compétences qui peuvent s’appliquer. Si nous faisons du bon boulot d’artisanat logiciel, nous pouvons créer un système facile à changer en toute sécurité. Il s’agit de compétences que Josh Kerievsky appelle « sécurité technique ». J’aime bien ce terme. Marier sécurité et efficacité représente en quelque sorte le nirvana du développement logiciel.

A : Comment puis-je savoir si c’est le cas ?
B : En avez-vous parlé avec les membres de l’équipe ?
A : Je leur ai dis à quel point il était important qu’ils aillent plus vite. Qu’est-ce que vous voulez d’autre que je leurs dise ?
B : Est-ce que vous leurs avez demandé et écouté ?
A : Si c’était si important, n’auraient-ils pas dû simplement m’en parler ?

L’un des problèmes les plus frustrants lorsque l’on est un responsable, c’est que les gens ont peur de vous dire les choses et de vous demander des choses. C’est assez ennuyeux. Les préoccupations liées au succès du rôle tendent à ternir les évènements quotidiens. Même si cela devrait faire partie de leur boulot de tenir informé leur responsable, de plus en plus d’employés ont plutôt tendance à le tenir éloigné.

Et c’est le cas si les managers sont effrayants ; s’ils font des demandes, ou s’ils insistent pour obtenir des résultats que l’équipe ignore comment les leurs fournir. S’ils annulent les congés ou s’ils demandent à l’équipe de travailler plus longtemps, ils seront alors probablement perçus comme de petits tyrans ; cela coupe la communication.

Les gens auront alors tendance à éviter les interactions désagréables ou malsaines. En conséquence, ils ne viendront pas voir les managers pour leurs demander un quelconque soutien et ils ne leurs apporteront aucune mauvaise nouvelle non plus. Ils se cacheront. Ils vont s’effacer.

Évitez donc ce problème.

Il existe peu de choses qui soient aussi puissantes et aussi riches en terme d’apprentissage que de s’impliquer activement au sein d’une équipe. Vous pouvez apprendre à quel point les tâches quotidiennes peuvent être difficiles ou ennuyeuses. Vous pouvez voir à quel point l’équipe peut être gênée par des interruptions, les risques et l’incertitude.

Il est possible d’établir une relation honnête avec les autres sans tenir compte de la hiérarchie. Il est question ici de respect et de communication directe mais aussi de soutien et de qualité de la relation.

B : Vous avez sans doute remarqué que l’équipe est passée de 19 à 23 points et que vous ne savez pas comment elle a fait.
A : Je suppose qu’elle est passée de 19 à 23 parce qu’elle a travaillé plus dur.
B : Oui, vous avez raison.

Assez souvent, il peut nous arriver de penser que « travailler plus dur » soit la bonne réponse. Il existe une croyance vraiment déconcertante consistant à penser que les collaborateurs sont paresseux et que seul un sévère avertissement ou un discours motivant de la part de leur manager va leur faire faire un effort. C’est une idée à la fois fausse et dangereuse. Même si elle semble vrai, il s’agit d’une idée dangereuse.

Peter Scholtes a dit ceci :

Le plus grand cynisme managériale c’est de soutirer des efforts à des collaborateurs jugés « paresseux » de différentes manières : récompenses, compétitions, ou programme de prime au mérite. La plupart des managers ne sont pas conscient de cette croyance pessimiste, mais une grande partie de leur « programme de motivation » est faite comme si cette prémisse était vraie.

Nous ne voulons pas que nos collaborateurs travaillent plus dur. Nous voulons qu’ils soient plus accomplis. Si nous confondons les objectifs alors nous nous retrouvons dans les genres de problèmes dont nous avons discuté dans la partie V lorsque nous avons parlé de « leur prendre leurs outils ». Leurs rendre la vie plus difficile ne donne rien de bon au niveau du résultat.

Joignez-vous à nous pour la partie X où nous parlerons expérimentation et accélération des processus.


Auteur : Tim Ottinger
Source : Q and A on velocity, Part IX
Date de parution originale : 22 Août 2019


Traducteur : Nicolas Mereaux
Date de traduction : 21/11/2020


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